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12 avril 2018

Diffamation sur Facebook : La Cour d’Appel de Poitiers rappelée à l’ordre

Dans un arrêt rendu le 7 février dernier, la Cour de cassation est venue casser sans renvoi un arrêt rendu par la Cour d’Appel de Poitiers dans une affaire de diffamation publique sur internet et plus spécifiquement sur Facebook.

Le défendeur, un ancien professeur de l’Université de Poitiers, avait publié sur son compte Facebook des propos imputant à l’actuel Président et Doyen de l’Université de Potiers un comportement malhonnête et irrespectueux du droit.

Ce dernier l’avait alors assigné en référé sur le double fondement de la diffamation et de l’injure publique.

En première instance, le défendeur avait soulevé la nullité de l’assignation, la double qualification juridique portant sur les mêmes propos.

Son exception de nullité avait alors été balayée au motif assez extraordinaire que « les propos qualifiés de diffamatoire et d’injurieux étaient totalement distincts« .

Il lui était par ailleurs « fait défense et interdiction », mesure plus que contestable compte tenu de son caractère général et absolu, « de publier tout écrit relatif à Monsieur Yves J. ou à l »Université de Poitiers dont ce dernier est l’actuel président ».

Au stade de l’appel, même aveuglement de la Cour de Poitiers, qui a également considéré, alors même que la double qualification était plus qu’évidente, « qu’il ressort de la lecture de la citation (il s’agissait d’une assignation en référé et non pas d’une citation, passons…) qu’il n’existe aucun cumul de qualification, M. M. savait exactement les éléments qui lui était imputés, à titre de diffamation puis à titre d’injure, ainsi que les textes visant et réprimant ces faits. Il a pu ainsi se défendre sur une base précise et juridiquement déterminée. Il n’y a pas de double qualification : les injures qui lui sont imputées sont sont précises et strictement citées. Elles ne sont pas englobées dans les propos diffamatoires incriminés qui visent un comportement et des faits portant atteinte à l’honneur et à la considération de M. J ».

Fort heureusement pour le défendeur, et le droit en général, la Cour de cassation a cassé cet arrêt, sans renvoi, dans les termes suivants :

« Attendu que, pour rejeter la demande d’annulation de l’assignation l’arrêt retient que M. M. connaissait les éléments qui lui étaient imputés à titre de diffamation et ceux qui l’étaient à titre d’injure, qu’il a pu organiser sa défense en fonction des fondements juridiques invoqués et que les faits qualifiés d’injure n’ont pas été compris dans les propos considérés comme diffamatoires ;

Qu’en statuant ainsi, alors que les mêmes passages des mêmes écrits se trouvaient poursuivis sous deux qualifications différentes et que ce cumul de qualifications était de nature à créer pour M. M une incertitude préjudiciable à sa défense, de sorte que l’assignation était nulle en son entier, la cour d’appel a violé le texte susvisé ».

Cet arrêt n’apporte rien de nouveau, la jurisprudence  étant constante sur ce point depuis des années.

Toutefois, cette affaire de diffamation démontre que certaines juridictions ne semblent pas encore maîtriser le sujet ; il n’est donc pas inutile de rappeler, au visa de cet arrêt du 7 février 2018, que des propos publiés sur internet ne peuvent pas recevoir une double qualification, conformément à l’article 53 de la loi du 29 juillet 1881. Ils sont soit injurieux, soit diffamants.

La sanction encourue, en cas de non-respect de cette exigence, est la nullité de l’assignation, sans qu’il soit nécessaire de démontrer un grief particulier.

Cette affaire, dans laquelle est intervenu le cabinet, a fait l’objet d’une publication sur le site de jurisprudence spécialisé www.legalis.net, à l’adresse suivante :

https://www.legalis.net/actualite/facebook-nullite-dune-assignation-pour-injure-et-diffamation-concernant-les-memes-faits/