Dans un arrêt du 16 janvier 2024, la Cour d’appel de Versailles a confirmé un jugement rendu par le Tribunal correctionnel de Pontoise ayant condamné une adjointe au Maire, pour des propos injurieux tenus en séance de conseil municipal.
Alors que les débats étaient particulièrement houleux le jour de la séance en cause, entre les membres de la majorité et de l’opposition, l’élue de la majorité s’était adressée aux élus municipaux de l’opposition, en fin de conseil municipal, en ces termes : « vous êtes la honte du genre humain messieurs dames »
Le caractère public des propos de l’adjointe n’était pas contesté, dès lors que la séance du conseil municipal était ouverte au public et qu’elle était par ailleurs retransmise sur internet, sur la page Facebook de la commune.
En revanche, de nombreux points de procédure étaient soulevés ; ils ont tous été rejetés par le Tribunal correctionnel comme par la Cour d’appel.
Il était notamment question de savoir si les propos avaient été tenus à raison de la qualité d’élus des parties civiles, et donc de statuer sur le bienfondé du fondement juridique des poursuites engagées au visa de l’article 33 alinéa 1er de la loi du 29 juillet 1881 sur la presse.
Il s’agissait également de se prononcer sur la prétendue erreur de qualification invoquée par la défense, le conseil de la prévenue ayant soutenu que le délit d’injure devait être absorbé par celui de diffamation.
Sur le fond, le sujet était surtout de statuer sur le caractère illicite des propos, dans un contexte où ils ont été tenus pendant un conseil municipal. En effet, en matière de polémique politique, il est de jurisprudence constante que l’appréciation des limites admissibles de la liberté d’expression doit être plus grande.
En effet, et comme l’a relevé le Tribunal, « le champ politique est sujet à discussion et la nécessité du débat démocratique doit permettre à chaque point de vue de s’exprimer, la vivacité des propos étant plus tolérable qu’en d’autres circonstances ».
En l’espèce toutefois, les magistrats ont estimé que les propos n’étaient « absolument pas nécessaires au débat de fond, et que, outre leur caractère évidemment excessif, ils n’ont eu d’autre but que de rabaisser les parties civiles et de les décrédibiliser, en portant atteinte non à leurs idées mais à leurs personnes ».
La Cour a fait sienne cette motivation, relevant que « la liberté d’expression ne saurait autoriser des propos outrageants portant manifestement atteinte à la réputation et à la dignité des personnes en les rabaissant à une frange méprisable de l’humanité, à la « honte » du genre humain ».
Il convient de préciser que l’auteure des propos s’est pourvue en cassation.
Cette affaire a été couverte par la presse locale :
Pour plus d’informations, l’arrêt de la Cour d’appel est accessible Arrêt CA Versailles :