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23 mars 2018

Le contributeur français du site internet www.psiram.com condamné pour violation de la vie privée

Dans un jugement du 14 février 2018, la 17ème chambre du Tribunal de Grande Instance de Paris a condamné la personne à l’origine d’une page publiée sous couvert d’anonymat sur le site internet www.psiram.com, site qui selon sa page d’accueil a vocation à dénoncer les « croyances irrationnelles » et « les méthodes de charlatanisme, de tromperie et d’arnaque ».

Le demandeur à l’action avait découvert, en insérant ses nom et prénom sur Google, qu’une page de ce site lui était entièrement consacrée et portait son nom. Particulièrement bien référencée dans Google, celle-ci faisait état, dans le détail, de deux affaires pénales le concernant relativement anciennes.

Des éléments de sa vie privée étaient également révélés, dans le but évident de lui nuire et de lui porter préjudice.

Très affecté, et estimant que les informations publiées portaient une atteinte intolérable à sa vie privée, le demandeur a alors fait le nécessaire, en recourant notamment aux services d’un investigateur numérique, pour identifier la personne à l’origine de la page litigieuse.

Après plusieurs semaines d’investigation et de recoupements, son travail a porté ses fruits.

Le demandeur a alors assigné le contributeur du site www.psiram.com sur le fondement de l’article 9 du code civil.

Au terme d’une analyse approfondie, le Tribunal de Grande Instance a tout d’abord rappelé que les décisions de justice sont par nature publiques et échappent, de ce fait et par principe, à la sphère de la vie privée :

« Si, en principe, les condamnations prononcées par les juridictions pénales qui sont rendue publiquement échappent de ce fait à la sphère protégée de la vie privée, c’est à la condition que ce rappel ne soit pas fait avec malveillance et réponde aux nécessités de la liberté d’expression ».

Puis, ce principe a été largement atténué dans les termes suivants, lesquels méritent d’être intégralement repris :

« Pour autant, l’évocation et la reproduction de ces décisions d’une certaine ancienneté, portant sur des faits encore plus anciens en prenant le soin de lever l’anonymat s’attachant à leur diffusion sur internet, à raison du lien avec le respect de la vie privée des personnes concernées justement pris en compte par l’anonymisation des décisions de justice, en les reproduisant tout ou partie sur la page spécialement dédiée au demandeur, n’alimentant le débat sur la santé et les compléments nutritionnels d’aucun élément nouveau, tout en faisant ressurgir au premier plan l’actualité judiciaire ayant abouti à la condamnation de l’intéressé, peut apparaître mue par une certaine malveillance ; une telle malveillance dirigée contre le demandeur est soulignée par la reproduction de l’avis nécrologique concernant le décès de son père Monsieur X, tel qu’adressé par les proches de ce dernier, trois ans auparavant, laquelle caractérisé une intrusion dans ce qui relève de l’intimité du demandeur.

L’atteinte à la vie privée et la malveillance qui l’accompagne sont dans ces conditions caractérisées ».

En conclusion, cette décision est très importante en pratique, à l’heure d’une transparence accrue et pas toujours souhaitable sur internet.

En effet, elle vient rappeler que si, par essence, les décisions de justice sont publiques et qu’elles peuvent de ce fait être publiées sur le réseau sans qu’il soit nécessaire d’anonymiser le nom des parties, leur publication ne doit pas être réalisée avec malveillance.

A défaut, l’auteur des publications encourt une condamnation pour atteinte à la vie privée, surtout si les décisions publiées sont relativement anciennes.

Si les décisions de justice sont récentes, il convient également d’être vigilant, une condamnation sur le fondement de la diffamation publique étant parfaitement envisageable.

En effet, rappelons que dans un arrêt du 17 octobre 2013, la Cour d’Appel de Versailles a estimé, en confirmant un jugement rendu par le Tribunal Correctionnel de Nanterre le 4 septembre 2012, que :

« Si la publication d’une décision de justice ne constitue pas en soi une diffamation, la Cour de cassation estime qu’il en va différemment lorsque cette publication a été faite avec malveillance pour donner à la condamnation une publicité particulière et supplémentaire.

L’affaire ayant abouti à la décision 14 février 2018, dans laquelle le cabinet est intervenu, a été publiée et commentée sur le site de jurisprudence www.legalis.net, à l’adresse suivante :

https://www.legalis.net/actualite/condamnation-pour-publication-de-decisions-de-justice-en-ligne/